Mosaïque romaine d’un Phœnix. De Daphne, une banlieue d’Antioche-sur-l’Oronte (Antkaya en Turquie aujourd’hui). Musée du Louvre.

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Symbole universel

Le Phœnix renaît toujours

19 Jan 2022 | Culture, histoire, philosophie

Nos lecteurs le savent: le Journal de l’Immobilier est publié par une société d’édition créée par Le Temps SA (65%) et la jeune société Phœnix Communication SA (35%). L’illustre égyptologue genevois
Massimo Patanè nous a fait l’amitié de résumer la signification de cette créature symbolique.

L’oiseau solaire qui renaît de ses cendres est un mythe commun de l’humanité, attesté jusqu’en Extrême-Orient, symbole de résilience s’il en est pour tous ceux qui n’acceptent pas le jeunisme actuel, l’opposé de la vénération des Anciens d’autrefois.
Nous nous limiterons ici au monde méditerranéen et occidental. Son nom en grec signifie rouge comme la braise et l’origine du mythe grec viendrait du Liban ancien. Pourtant, sa légende est rattachée très tôt à Héliopolis, actuellement une banlieue du Caire. Dans le Livre des Morts, on parle effectivement d’un oiseau Benou, qui peut lui être assimilé, mais dont le plumage est gris-bleu. Le même volatile est représenté pour évoquer le mot Bah, qui signifie inondation. Nous avons là une indication importante pour expliquer la raison qui a permis aux premiers chrétiens de l’utiliser comme symbole du Christ, ce qui est attesté dans des mosaïques paléochrétiennes.
Un auteur chrétien, Lactance, qui aurait vécu entre 250 et 325 de notre ère, a écrit un traité «De l’oiseau Phœnix». Il nous explique que le Phœnix représente parfaitement Jésus, car sa résurrection ne passe pas par la chair. En effet, de nombreuses divinités de la nature au Proche-Orient, comme Osiris ou Adonis, après avoir perdu leur sexe, le retrouvaient par magie et pouvaient renaître et procréer. C’est le cas d’Osiris, démembré, jeté au Nil, dont l’organe reproducteur est avalé par le poisson silure et se trouve ensuite recréé par Isis (Plutarque, «Au sujet d’Isis et d’Osiris», chap. 18). Or, les premiers chrétiens ne voulaient pas de ça, ainsi que le précise le credo attribué à Clément d’Alexandrie: «Généré, non créé, de la même substance du Père».
Le Phœnix, qui renaît de ses cendres était donc l’image parfaite du Christ. Il l’est aussi de ceux parmi nous qui refusent de céder aux modes passagères.

 

Massimo Patanè
Egyptologue
Universités de Genève et Lausanne